Le Suisse Richard Pfister, ingénieur œnologue de formation et "oenoparfumeur", travaille dans le vin et la parfumerie après un mémoire sur « les méthodologies des parfumeurs
et leurs applications dans le vin ». Il est membre du grand Jury Oenovideo.
Ton métier consiste-t-il à créer des arômes dans les vins ?
- Je suis contre l’apport aromatique dans les vins, qui en
principe ne se pratique pas en Europe, mais se fait outre-atlantique pour
corriger des défauts, ou apporter des odeurs pour en cacher d’autres. Ces
pratiques se décèlent assez vite, à l’olfaction ou avec une machine de
chromatographie par exemple.
Les levures, elles, apportent un plus. En fait, c’est l’association
de la levure avec un type de vinification qui apporte un peu plus d’odeur. La
levure ne crée pas de nouvelles odeurs, elle rehausse celles qui sont dans le
vin.
Est-ce que la dégustation n’est pas trop ciblée sur le nez,
au détriment de la bouche ? Henri Jayer disait « Un vin n’est pas
fait pour être reniflé mais pour être bu… »
- L’olfaction présente une plus grande complexité. Il existe
environ 40.000 odeurs sur la planète, nous avons un millier de récepteurs
différents qui peuvent sentir chacun plusieurs odeurs, ce qui fait une énorme
masse de possibilités. On a moins de variété en bouche. En mettant de côté la
rétro-olfaction, il reste les goûts fondamentaux - qui peuvent être un peu
complexes comme les acides - et les textures
(gaz carboniques, alcools, tanins…) : c’est beaucoup moins riche que les
arômes. Le système nerveux lié à l’olfaction est de plus le seul qui est en
contact direct avec l’extérieur, et qui… se régénère tout seul au fil des jours…
- Est-ce qu’il y a des films à voir avec son nez ?
Il y a "Le Parfum", mais il vaut mieux lire le livre de
Patrick Süsskind ; le texte est plus intéressant. Mais il y a beaucoup de
choses éloignées de la réalité. Il y a des films en odorama, parfois assez bien
faits comme au musée de Grasse.
- Est-ce que tu regardes les films avec ton nez ?
Je m’entraîne tous les jours à l'olfaction pour mon métier, et il m’arrive de faire
des rêves olfactifs, des rêves normaux avec une composante olfactive.
Je peux avoir l’impression de sentir lorsque je regarde un
film, mais ce n'est pas instinctif, c’est le fruit d’une concentration, c’est le cerveau qui crée l’équivalent
en odeur de ce qu’on voit.
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